La production massive d'électrolyseurs de l'eau fonctionnant avec une membrane échangeuse de protons (PEMWE) nécessite de surmonter plusieurs obstacles : (i) améliorer la cinétique de la réaction de dégagement de dioxygène (OER), (ii) améliorer la stabilité du matériau catalytique anodique, et (iii) diminuer le coût des couches catalytiques (faible quantité de métal noble). Des travaux expérimentaux effectués il y a plus de 40 ans ont établi que le dioxyde de ruthénium (RuO
2) est le meilleur électrocatalyseur en milieu alcalin, mais également que cet oxyde souffre d'instabilité en milieu acide. Le dioxyde d'iridium (IrO
2) est un autre matériau catalytique intéressant : il est chimiquement stable, bon conducteur électronique mais souffre de son coût élevé et de sa rareté surtout lorsqu'il est utilisé sous forme de microparticules comme c'est le cas à l’anode d’un PEMWE.
Dans le cadre du projet MOISE, nous synthétisons, caractérisons et déterminons l’activité OER de nanoparticules IrO
x supportées sur des aérogels d'oxydes métalliques (MO
x). Pour acquérir des connaissances fondamentales sur les premiers stades de formation des oxydes de surface sur Ir, nous utilisons des monocristaux et combinons électrochimie à la
spectroscopie d'impédance électrochimique, la
spectroscopie de photoélectrons X et la spectrométrie de masse couplée à un plasma inductif. Nous avons récemment montré que les couches d'oxy-hydroxydes qui se forment dans la région avant l'OER présentent des états d'oxydation mixtes (présence d'espèces Ir(0), Ir(+III) et Ir(+IV)), et que la fraction de chaque état d'oxydation dépend de l'orientation cristallographique du monocristal Ir(hkl). Dans la région de l’OER, nos travaux fournissent des preuves que les espèces Ir(+III) se dissolvent progressivement, ce qui entraîne un enrichissement de la surface et des régions proches de la surface en espèces Ir(+IV), et donc une diminution de l'activité OER intrinsèque. Les résultats indiquent une convergence vers un état de surface plus stable mais moins actif, qui ne dépend ni de la disposition initiale des atomes de surface (orientation cristallographique, proportion d'atomes fortement et faiblement coordonnés) ni de leur état d'oxydation (état initial vs surfaces Ir(hkl) électrochimiquement activées).
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En collaboration avec Bruno Gilles, directeur de recherche au SIMAP, nous élaborons également des couches minces d'Ir recouvrant un métal de transition moins cher et plus abondant (comme le cobalt (Co), le nickel (Ni), le cuivre (Cu), le fer (Fe) ou le Ru) par dépôt physique en phase vapeur. Ces couches minces servent à identifier les mélanges élémentaires appropriés, à étudier les conditions de recuit thermique et d'oxydation les plus appropriées (pression partielle, température) et la technique de dépôt pour obtenir des catalyseurs bimétalliques hautement actifs pour l’OER. Nous transférons ensuite les connaissances acquises sur électrodes modèles (monocristaux et films minces) à des nanoparticules IrO
x. Dans ce but, nous développons des supports conducteurs électroniques qui (i) présentent une grande surface spécifique pour maximiser la distribution et éviter leur agglomération/agrégation, (ii) présentent une distribution optimale de la taille des pores pour permettre un accès facile des molécules d'eau à l'électrode et le transport du dioxygène produit et (iii) sont capables de supporter un potentiel électrochimique élevé (
E > 1,7 V
vs. l’électrode standard à hydrogène - SHE), une température moyenne (60 <
T < 80°C) et un environnement très acide. Ces conditions de fonctionnement rendent instables les supports classiques à grande surface, tels que les noirs de carbone (le carbone est oxydé à des potentiels supérieurs à 0,207 V par rapport à la SHE). Nous nous concentrons sur les aérogels de SnO
2 dopés, et modulons leur conductivité électronique en modifiant la nature et la concentration de l'élément dopant.
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